La création de marque
Posté le 29 février 2024 dans Droit de la Propriété intellectuelle, Droit des affaires, Droit des nouvelles technologies / Internet.
La marque est l’élément de reconnaissance d’un service ou d’un produit. Elle présente un double intérêt à savoir protéger les consommateurs qui connaissent la qualité du produit ou du service acheté et protéger les entreprises contre des concurrents qui essaieraient de leur ressembler. La marque doit être représentée de façon à permettre à toute personne de déterminer précisément et clairement l’objet de la protection dont joui le titulaire de la marque.
Afin d’être déposée la marque doit tout d’abord être distinctive, c’est-à-dire qu’elle doit recourir à des signes arbitraires. A titre d’exemple, la marque Mont Blanc pour un stylo, ou la marque Apple pour un ordinateur sont arbitraires et, partant, peuvent être utilisés pour déposer une marque. Elle ne doit cependant pas être descriptive du produit ou du service qu’elle désigne. Elle ne doit pas non plus décrire la qualité, la quantité, la destination, la valeur, ni la provenance géographique du bien ou du servie qu’elle vise. Il en va de même si la marque contient exclusivement des éléments ou des indications devenues usuelles dans le langage courant.
Il peut à ce titre s’avérer pertinent d’envisager la création d’une marque originale. En effet, la marque originale pourra faire l’objet d’une protection par le droit d’auteur, ce qui permettra de cumuler les protections du droit d’auteur et du droit des marques. Concrètement, vous pourrez vous reposer sur deux fondements juridiques distincts (donc deux critères de protections différents) et solliciter plus de dommages et intérêts en cas de contrefaçon. Ce cumul donnera également plus de valeur à votre société.
La marque ne doit pas non contenir certains éléments interdits par la convention de Paris et notamment les armoiries des pays. Il n’est donc pas possible de déposer une marque contenant le drapeau tricolore.
Afin d’être déposée, la marque ne peut être contraire à l’ordre public. Ainsi, dans une affaire dite « puta madre », les juges ont retenu que même si l’expression « puta madre » est positive en langue espagnole, elle est comprise comme une insulte en langue française et par conséquent s’avère être contraire à l’ordre public. Cette marque a, par conséquent, été rejetée et ne peut pas être protégée. La solution a été identique en droit italien. En outre, la solution est partagée aux États-Unis et la marque « Pschit » a été refusée car elle ressemblait à « shit » en langue anglaise. L’ordre public est donc compris dans un contexte linguistique et culturel qu’il est pertinent d’envisager avant de déposer une marque dont l’ambition est de rayonner à l’international.
Il est également impossible d’enregistrer une marque qui soit de nature à tromper le public quant à la nature, la qualité ou la provenance géographique d’un produit ou d’un service.
Une marque ne peut pas être déposée lorsqu’elle l’est de mauvaise foi. Il en va ainsi notamment lorsque le déposant avait parfaitement connaissance de l’existence du nom et a souhaité le déposer avant l’utilisateur légitime.
Il est également nécessaire de veiller aux antériorités avant d’effectuer un dépôt de marque. Une marque sera ainsi déclarée nulle si elle est identique à une marque antérieure et que les produits ou services désignés sont identiques. L’INPI a établi des règles d’interprétation retenant notamment que le début de la marque est plus marquant pour le public que la fin de la marque, que des sonorités similaires peuvent créer un risque de confusion même si les orthographes sont différents ou encore que les différences de couleurs sont inopérantes pour écarter le grief de contrefaçon de marque. Il en ira de même lorsqu’elle est identique ou similaire à une marque antérieure et que les produits ou services sont identiques ou similaires s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion. Il ne sera pas non plus possible de déposer une marque lorsque le signe envisagé est déjà renommé en France ou pour une marque au sein de l’Union Européenne, ou si les produits ou services désignés sont identiques ou similaires.
Une marque ne pourra pas être déposée si elle est similaire ou identique à une raison sociale (c’est-à-dire au nom d’une société tel qu’il apparaît sur son Kbis) et qu’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public. En ce qui concerne les noms commerciaux, l’antériorité sera opposable uniquement si elle est connue nationalement. En conséquence, un nom commercial connu régionalement ne pourra constituer une antériorité opposable à une marque. Une marque ne pourra être déposée si elle créé un risque de confusion avec une indication géographique, un droit d’auteur, un dessin ou un modèle protégé, un droit de la personnalité d’un tiers et notamment son nom de famille, le nom, l’image ou encore avec la renommée d’une collectivité territoriale ou un établissement public de coopération intercommunale ou encore le nom d’une entité publique s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public.
Une fois que ces différents contrôles sont effectués, la marque va pouvoir être déposée à l’Institut National de la Propriété Intellectuelle pour une marque française ou à l’Office de l’Union Européenne pour la Propriété Intellectuelle pour le dépôt d’une marque européenne. Dans le premier cas, la marque ne sera déposée que pour le territoire français (une option peut être prise pour le territoire de la Polynésie française) et dans le second cas la marque sera déposée pour tout le territoire de l’Union Européenne.
Une fois que la marque est déposée, elle fait l’objet d’une publication dans le journal officiel de l’institution choisie. En cas de dépôt d’une marque française, les tiers bénéficient d’un droit d’opposition pendant un délai de deux mois à compter de la publication. Pour les marques européennes, le délai de trois mois à compter de la publication. Pendant ce délai, la marque est opposable mais peut faire l’objet d’une procédure d’opposition permettant à un tiers de saisir l’Office de Propriété Intellectuelle en violation du droit d’antériorité dont il disposerait et qui rendrait la marque déposée nulle. La procédure d’opposition peut être l’occasion pour les parties de négocier afin, par exemple, de limiter le champ d’application de la nouvelle marque, ou encore de négocier un accord de coexistence des deux marques permettant à celles-ci d’exister en même temps. À défaut d’accord entre les parties, elles échangent des conclusions en ligne sur les plateformes des offices de propriété intellectuelle. Il leur est ainsi nécessaire d’apporter la preuve pour le demandeur qu’il existe un risque de confusion et pour le nouveau déposant qu’il n’existe pas de risque de confusion.
Lors du dépôt de la marque, il est nécessaire de déterminer les produits et/ou services pour lesquels la marque sera déposée. Cela permet de choisir les classes applicables à la marque conformément à la nomenclature dite de Nice.
Le débat tourne très souvent autour de la question du public pertinent et de son risque de confusion. À titre d’exemple, le cabinet a pu intervenir dans une affaire dans laquelle deux marques avaient été déposées dans le secteur du médicament. Étant donné qu’il s’agit d’un marché particulier car seuls les laboratoires étaient concernés, l’Office Européen de la Propriété Intellectuelle a retenu que le seuil d’attention était particulièrement élevé et par conséquent que les deux marques relativement similaires ne présentaient pas de risque de confusion car l’acheteur était parfaitement en mesure d’effectuer une distinction entre l’ancienne et la nouvelle marque.
Si la marque est déposée pour la France, il sera toujours possible de déposer la marque pour l’Union Européenne ou un autre État (à condition que l’État ait ratifié la convention de Paris) dans un délai de six mois tout en bénéficiant de la date d’antériorité française. Il est néanmoins courant que lorsque les déposants ont pour projet d’utiliser la marque concomitamment dans plusieurs territoires, ils déposent immédiatement la marque pour les différents territoires visés. La marque est protégée pour une durée de dix ans. Elle est renouvelable indéfiniment. Toute modification du signe ou extension de la liste des produits ou services désignés fait l’objet d’un nouveau dépôt.
Il est également possible de procéder à un dépôt de marque international, soit en se rapprochant des offices nationaux des marques, soit en faisant parvenir sa demande à l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) qui servira d’intermédiaire.
Il n’est cependant pas utile de déposer une marque pour un pays où elle ne serait pas utilisée. En effet, la marche risque une déchéance si elle n’est pas utilisée pendant un délai de 5 ans.
Le cabinet reste à votre disposition pour toute question concernant les marques.
Liens utiles :
-vidéo YOUTUBE : https://youtu.be/QwSqM42DhnQ
-INPI sur le régime de la marque : La marque | INPI.fr
-Intelligence artificielle et marques : Intelligence artificielle : la délicate question des droits de propriété intellectuelle dans la publicité (lemonde.fr)