Les rédacteurs de la directive sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique du 14 septembre 2016 ont souhaité rééquilibrer les relations entre auteurs et plateformes en ligne. Pour ce faire, la directive a opté pour une définition englobante à l’article 2.6 qui définit la notion de fournisseurs de services de partage de contenus en ligne comme « le fournisseur d’un service de la société de l’information dont l’objectif principal ou l’un des objectifs principaux est de stocker et de donner au public l’accès à une quantité importante d’œuvres protégées par le droit d’auteur ou d’autres objets protégés qui ont été téléversés par ses utilisateurs, qu’il organise et promeut à des fins lucratives ».

La culture de l’Internet combinée aux dispositions de la directive 2000/31/CE relative au commerce électronique créant un « safe harbor » pour les plates-formes en ligne ont contribué à créer une situation où les auteurs des contenus ne sont pas rémunérés. Le rôle passif prétendu des plates-formes justifierait l’absence de rémunération des auteurs qui placent des contenus. La nouvelle directive a donc voulu rendre le droit d’auteur effectif sur les plateformes en ligne.

La nouvelle directive adopte ainsi une approche que l’on pourrait qualifier pro-business. En effet, elle rend effectifs les droits d’auteur (I) tout en assurant une protection des startups de l’internet (II).

I) L’effectivité de l’application des droits d’auteur

Les intérêts des auteurs se trouveront protégés par le paiement de droits (A) ainsi que par la lutte contre la contrefaçon (B).

A) La protection des auteurs par le paiement de droit

La directive oppose le droit d’auteur aux fournisseurs de services de partage de contenus en ligne lorsqu’ils accomplissent un acte de communication publique ou de mise à disposition du public. Les fournisseurs qui souhaiteraient utiliser des œuvres protégées doivent par conséquent tenter et parvenir à des accords avec les titulaires de droits.

La directive prévoit par ailleurs la mise en place d’un devoir de transparence et de loyauté afin de rendre la rémunération la plus juste possible ainsi que la mise en place un mécanisme de négociation permettant aux parties de compter sur l’assistance d’un organisme impartial.

Si aucun accord n’est conclu les plateformes doivent empêcher la mise à disposition des œuvres contrefaisantes.

B) La protection des auteurs par la lutte contre la contrefaçon

Les plateformes doivent fournir leurs meilleurs efforts pour empêcher la mise à disposition des œuvres à l’avenir mais ne sont cependant pas soumis à un devoir général de surveillance. Le caractère suffisant des moyens mis en place par la plateforme variera en fonction du type, de l’audience du service, du type d’œuvre, de la disponibilité de moyens adaptés et efficaces et leur coût pour les fournisseurs de services.

Ces charges a priori lourdes pour les plateformes seront néanmoins compensées dans le cadre de la recherche d’un équilibre entre les intérêts en présence.

II) La protection des startups de l’internet

La directive distingue entre des activités non lucratives qu’elle exclut a priori de l’application du régime de l’article 17 (A) et les activités lucratives dont elle exclut certaines a priori en fonction de leur nature ou de leur activité (B).

A) Les activités non lucratives

Le régime établi par la nouvelle directive risquerait de créer une barrière à l’entrée sur le marché de nouvelles plateformes promouvant un accès libre aux informations. Sont par conséquent exclues les plateformes telles que les encyclopédies en ligne à but non lucratif, les répertoires éducatifs et scientifiques à but non lucratif, les platesformes de développement de partage de logiciels libres ainsi que les fournisseurs de services de communication électronique au sens de la directive 2018/1972 du 11 décembre 2018. Cela permet de ne pas limiter la liberté d’expression ainsi que la communication des idées en ligne.

B) Les activités lucrative

La directive prévoit également l’exclusion par nature de certains types de plateformes lucratives que sont les places de marché en ligne et les services de cloud qui continuent ainsi à bénéficier des dispositions de l’article 14 de la directive e-commerce. De surcroît, l’application aux startups de la nouvelle directive est exclue en fonction de l’activité pour les sociétés ayant moins de trois ans et un chiffre d’affaire annuelle inférieure à 10 millions d’euros.

Cependant, lorsque le nombre moyen de visiteurs uniques par mois de ces plateformes dépasse les 5 millions d’euros elles doivent faire leur possible afin d’empêcher le téléchargement des œuvres pour lesquelles les ayants droits ont fourni des informations pertinentes. Dans cette hypothèse elles devront rémunérer les auteurs et ne bénéficieront plus du régime hébergeur de la directive e-commerce.

Conclusion :

La solution semble équilibrée et assure le respect des intérêts non seulement des auteurs européens mais également des plateformes européennes auxquelles ne sont pas opposés des barrières substantielles à l’entrée sur le net. Cependant, plus que de réformes dont les transpositions en droit internes risquent de prendre encore de longs mois, c’est tout une révolution de l’approche de la gratuité en ligne qui viendra assurer la meilleure protection des auteurs.