Les salariés travaillent de plus en plus avec des outils numériques et à distance. Le droit du travail et des données personnelles vient les protéger dans le cadre de l’exécution de leur contrat de travail.

À ce titre, le Ministère du travail a mis en ligne le 16 janvier 2020 le Code du travail numérique permettant aux salariés d’obtenir des réponses à leurs questions. Les salariés trouveront des réponses notamment sur :

  • le télétravail (i),
  • le droit à la déconnexion (ii),
  • l’usage de l’internet par un salarié (iii),
  • ou encore la possibilité de surveillance d’un salarié (iv).
  1. La mise en place du télétravail

Le droit français n’a pas instauré de droit au télétravail mais renvoie les parties à une éventuelle négociation à ce sujet.

La mise en place du télétravail ne constitue pas une limite à l’obligation pesant sur l’employeur d’assurer la sécurité physique – et psychique – de ses salariés. Bien au contraire, l’employeur reste soumis à une obligation de sécurité dite de moyens. Le télétravail implique à l’inverse pour l’employeur d’assurer la sécurité de ses salariés sur un site qu’il ne contrôle pas – par définition – à savoir le domicile de son salarié. En conséquence, l’employeur est tenu de faire ses meilleurs efforts afin de les protéger.

Que le salarié effectue son travail dans les locaux de l’entreprise ou à domicile dans le cadre du télétravail, l’employeur est responsable des accidents survenus pendant les heures de travail sur le lieu d’exécution du contrat de travail. Il devra donc s’assurer de la conformité du logement.

La difficulté première dans l’exécution du contrat de travail à domicile réside dans la nécessité pour l’employeur d’obtenir une autorisation préalable du salarié avant de s’y rendre et de procéder à une mise en conformité. Le télétravailleur conserve en effet un droit à la vie privée à son domicile. Ainsi, à titre d’exemple, il est peu probable que le local utilisé par le télétravailleur dispose d’une sortie de secours (et encore moins que le télétravailleur procède aux travaux nécessaires) alors qu’elle est obligatoire. Il conviendra dès lors d’opter pour l’exécution du contrat de travail dans une pièce conforme.

L’implication du salarié dans la mise en conformité de son espace de travail peut aller jusqu’à l’application de la qualité de maître d’ouvrage lorsqu’il adapte son espace de travail. Or, les aménagements ne doivent représenter aucune charge financière pour le salarié. L’employeur pourrait donc vouloir commander un audit du lieu d’exécution du contrat de travail. Ainsi, les caractéristiques du logement doivent être transcrites dans un document unique répertoriant les risques afin de satisfaire aux exigences de cohérence, de commodité et de traçabilité et devra être mis à jour annuellement.

Enfin, les salariés doivent être formés aux gestes de protection afin de se protéger sur leur lieu de travail. Les employeurs doivent, grâce à leur pouvoir disciplinaire, introduire des obligations en ce sens.

  1. Le droit à la déconnexion

L’employeur devra être attentif à la santé psychologique de ses salariés et notamment des télétravailleurs. En effet, pour ces derniers, le sentiment d’isolement, le nombre souvent réduit de pauses, le possible manque de considération créé par la distance risquent de peser sur la santé mentale des télétravailleurs.

Les employeurs doivent néanmoins la protéger au même titre que la santé physique. Ils sont ainsi avisés de conclure un « contrat psychologique » avec leurs collaborateurs. Dans cette perspective, l’employeur doit veiller au respect du droit à la déconnexion des salariés. Il est ainsi tenu d’un devoir de déconnexion et de détection des situations à risque. En pratique, cela peut s’effectuer par une suspension de l’accès aux serveurs à certains horaires.

L’application concrète du droit à la déconnexion n’est pas prévue par la loi mais renvoyée à une négociation interne à l’entreprise. La charte de l’entreprise doit au minimum préciser les modalités de l’exercice du droit à la déconnexion ainsi que les actions de formation et de sensibilisation à un usage raisonnable des outils numériques. À défaut d’accord au sein de l’entreprise, l’employeur définit les modalités d’exercice du droit à la déconnexion en veillant à ce qu’elles soient raisonnables.

Le droit à la déconnexion vise à préserver la santé mentale des télétravailleurs en mettant en place des mesures récepteurs et émetteurs.

Les mesures « récepteurs » peuvent être notamment :

  • L’introduction d’une absence d’obligation de répondre à un e-mail professionnel le soir ou le week-end.
  • Une mention automatique insérée dans le corps du mail rappelant que les mails tardifs n’appellent pas de réponse immédiate.
  • L’utilisation de la fonction d’envoi différé pour l’envoi de mails tardifs.

Les mesures « émetteurs » incluent notamment :

  • L’obligation de mettre une réponse automatique d’absence sur sa messagerie professionnelle.
  • La fermeture des serveurs au-delà d’une certaine heure
  • L’alerte du service ressources humaines en cas de sur-connexion…
  1. Usage de l’internet par le salarié

L’employeur peut limiter l’accès à internet à ses salariés. Cependant, il est compliqué de limiter trop drastiquement l’accès à internet. Il est ainsi toléré que le salarié utilise internet dans un but personnel tant que l’usage reste raisonnable, ne menace pas la sécurité du réseau de l’entreprise et ne ralentit pas sa productivité.

L’employeur a donc intérêt à rédiger une charte à l’intention de ses salariés régulant l’usage d’internet au travail. Cependant, même en l’absence de charte relative à l’usage d’internet, le salarié pourra être licencié pour faute dès lors que l’usage d’internet est déraisonnable.

  1. La mise en place de mesures de surveillance du salarié

L’employeur peut installer un système de vidéosurveillance de l’entreprise afin d’assurer la sécurité des biens et des personnes. Il est nécessaire de déterminer, en amont de l’installation de la vidéosurveillance, l’objectif de la vidéosurveillance (sécurité des personnes, sécurité des biens, dissuasion, identification des auteurs d’infractions etc…).

Les caméras ne doivent pas filmer les salariés sur leur poste de travail ni les salles de pause, les locaux syndicaux ou les toilettes. Quelques exceptions à ce principe ont été reconnues :

  • Manipulation d’argent par le salarié dans le cadre de son contrat de travail,
  • Entrepôt stockant des biens de valeur.

Seules les personnes expressément habilitées par l’employeur et dument formées peuvent consulter les vidéos. L’employeur doit déterminer la durée de conservation des images qui doit être en lien avec l’objectif poursuivi par la vidéosurveillance.

Si les caméras filment un lieu ouvert au public une autorisation préfectorale doit être obtenue.

En résumé : Il est de bonne pratique de rédiger une charte numérique (prévoyant notamment les conditions d’exercice du télétravail, le droit à la déconnexion et l’usage d’internet) au sein de l’entreprise (qui prévoira également les bons réflexes à avoir afin de préserver la sécurité informatique de l’entreprise), En cas de vidéosurveillance une charte ainsi qu’un marquage spéciaux devront être prévus au sein de l’entreprise.