Le jeu vidéo est une œuvre multimédia dans la mesure où elle entremêle image, sons et vidéos. Elle n’est donc pas uniquement un logiciel – ce qui aurait eu des incidences sur sa protection notamment en matière de droits moraux. Elle constitue également une base de données. Le cumul de régimes implique une diversité de protection.

  1. La protection par le droit d’auteur général

Le droit d’auteur vient protéger les créations originales. Dans le cadre de la création d’un jeu vidéo, différents éléments peuvent être originaux et par conséquent protégés par le droit d’auteur et notamment :

  • le nom et le logo du jeu vidéo (qui peuvent également être protégés en tant que marque, ce qui impliquerait dans ce cas un cumul de protections),
  • le scénario (au même titre que le scénario d’un film),
  • les personnages et les décors (autant dans leurs descriptions écrites que leur représentations graphiques),
  • la musique.

La pluralité des œuvres d’un jeu vidéo implique une pluralité de régimes juridiques applicables. En effet, une œuvre audiovisuelle ne peut être qualifiée d’œuvre collective. Il en résulte qu’il sera nécessaire d’obtenir une cession ou une licence de droit d’auteur pour les œuvres audiovisuelles (c’est-à-dire des séquences cinématographiques du jeu vidéo ainsi que les séquences animées d’images). En revanche, pour les autres œuvres, il sera possible de retenir qu’il s’agit d’œuvres collectives dès lors qu’elles sont commandées par une personne physique ou morale (exemple : Ubisoft) et quels sont créés par plusieurs personnes. Dans ce dernier cas, la titularité des droits née sur la tête de la personne à l’origine de la commande, ce qui lui évite d’obtenir une cession de droits d’auteur (cela n’empêchera pas l’employeur d’attribuer une rémunération spécifique pour ses salariés ayant contribué à la création de l’œuvre).

Enfin, pour les œuvres qui n’auraient pas été créées en interne par le producteur, il sera nécessaire d’obtenir une cession ou une licence de droit d’auteur (exemple : une bande-son qui aurait été créée par un tiers devra faire l’objet d’un contrat de cession ou de licence pour être reproduite dans le jeu vidéo).

  • La protection par le droit d’auteur spécial des logiciels

Le jeu vidéo fonctionne grâce à un logiciel. Cela avait amené la doctrine à appliquer la théorie de l’accessoire, ce qui impliquait que l’intégralité des composantes du jeu vidéo devait se voir appliquer le régime juridique du principal à savoir du logiciel. Cette solution a été rapidement écartée. On applique désormais un cumul de protection pour les jeux vidéo, ce qui nécessite en pratique la rédaction d’une succession de contrats de cessions de droit et de licences.

Le logiciel est protégé par le droit d’auteur s’il résulte d’un effort personnalisé portant la marque de l’apport intellectuel de son auteur. En conséquence, un logiciel qui ne résulterait pas de choix libre et créatif ne serait pas protégé par le droit d’auteur.

Le régime applicable au logiciel est cependant largement dérogatoire au droit commun du droit d’auteur. À ce titre, les droits d’auteur sont automatiquement dévolus à l’employeur des salariés ayant contribué à la création du logiciel du jeu vidéo. Ce régime ne s’applique pas aux stagiaires, prestataires externes et dirigeants non-salariés qui jouissent d’un droit d’auteur sur le logiciel qu’ils créent.

Enfin, les créateurs de logiciels ne bénéficient pas de la règle générale du droit d’auteur qui intéresse les auteurs au succès de leur création par le recours à une rémunération proportionnelle. Les créateurs de logiciels peuvent ainsi être rémunérés au forfait.

  • La protection par les régimes applicables aux bases de données

Le jeu vidéo peut être protégé en tant que base de données de 2 façons différentes:

  • s’il s’agit d’une architecture originale elle sera protégée par le droit commun du droit d’auteur (toute reproduction ou représentation sera interdite en dehors des exceptions du Code de la propriété intellectuelle comme la copie privée),
  • si la base de données résulte d’un investissement humain, matériel ou financier substantiel (la notion de « substantiel » n’est pas définie par le Code de la propriété intellectuelle afin de permettre au texte de s’adapter au plus grand nombre de situations nouvelles), elle bénéficiera de la protection sui generis des producteurs de bases de données (cela donne le droit aux producteurs de la base de données de s’opposer à toute extraction substantielle du contenu de la base – en conséquence, même si le producteur de la base de données n’est pas titulaire des droits d’auteur sur le contenu de la base de données, il pourra s’opposer à toute extraction substantielle des éléments qu’elle contient que l’extraction soit effectuée en une seule fois ou en plusieurs fois).
Conseils pratiques :

Il est conseillé au producteur du jeu vidéo de procéder à un enregistrement du jeu. Cet enregistrement n’est pas une condition de la protection, mais eu égard aux enjeux économiques, il permettra d’apporter la preuve de la création de l’œuvre en cas de contrefaçon. Le dépôt peut être effectué à l’agence pour la protection des programmes (APP).

Eu égard à la complexité du régime juridique applicable aux jeux vidéo, il est conseillé de se prémunir en contractualisant les rapports entre les intervenants et de faire auditer l’œuvre par un avocat.

Il apparaît nécessaire de placer des mesures techniques efficaces qui permettront aux producteurs de la base de données de neutraliser l’effet de certaines exceptions comme la copie privée.