L’assuré face à son assureur
Posté le 25 octobre 2024 dans Droit de la responsabilité civile.
Le contrat d’assurance est un accord par lequel l’assureur s’engage, moyennant une prime, à indemniser l’assuré en cas de réalisation d’un risque. Ce contrat est régi par des règles spécifiques qui imposent des obligations tant à l’assuré qu’à l’assureur. Nous revenons dans cet article sur les obligations respectives des parties dans le cadre d’un contrat d’assurance.
1. Les obligations de l’assureur
Les obligations de de l’assureur, comme de l’assuré, dans le cadre d’un contrat d’assurance sont principalement régies par le Code des assurances.
On parle d’abord de l’obligation précontractuelle d’information de l’assureur, c’est-à-dire avant même la conclusion du contrat.
L’article L. 112-2 du Code des assurances impose à l’assureur de fournir à l’assuré une fiche d’information sur le prix et les garanties, ainsi qu’un exemplaire du projet de contrat et de ses pièces annexes ou une notice d’information sur le contrat.
Cette obligation vise à permettre à l’assuré de comprendre l’intérêt et le fonctionnement des garanties proposées.
De plus, l’article L. 520-1 du Code des assurances impose à l’intermédiaire d’assurance de fournir des informations relatives à son identité, son immatriculation, les procédures de recours et de réclamation, et les liens financiers avec des entreprises d’assurance.
Ensuite, l’assureur, comme ses intermédiaires sont tenus d’une obligation de conseil.
L’article L. 521-4 du Code des assurances consacre l’obligation de conseil et d’exacte information de l’assureur et des intermédiaires.
Ainsi, l’assureur doit s’assurer que les garanties proposées sont adaptées aux besoins de l’assuré, et cette obligation perdure tout au long de l’exécution du contrat.
Cette obligation de conseil est une obligation de moyens, ce qui signifie que l’assureur doit mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour conseiller correctement l’assuré, même si les clauses du contrat sont claires et précises. L’assureur doit également informer l’assuré sur l’évolution législative, réglementaire ou jurisprudentielle susceptible d’influencer les garanties souscrites ou les risques.
A titre d’exemple, les manquements de l’assureur peuvent consister en :
- L’inadéquation des garanties proposées : L’assureur doit s’assurer que les garanties proposées sont adaptées aux besoins de l’assuré. Par exemple, dans une affaire, l’assureur n’a pas pris en compte la nature exacte de l’activité de l’assuré, ce qui a conduit à une couverture insuffisante pour des ensembles immobiliers de grande valeur (Cour d’appel de Reims, 1ère chambre, 6 décembre 2022, n°21/02146).
- L’absence d’information sur les délais de carence : Même si les conditions générales du contrat précisent un délai de carence, l’assureur doit attirer l’attention de l’assuré sur ce point, surtout si le risque est important. Par exemple, un assureur spécialisé dans la couverture des risques militaires doit informer un parachutiste militaire de l’existence d’un délai de carence d’un mois.
- Des conseils erronés sur les stipulations du contrat : La clarté des stipulations d’une police d’assurance ne dispense pas l’assureur de son obligation de conseil. Par exemple, un assureur peut être en faute s’il ne conseille pas correctement sur les clauses limitant la garantie ou excluant certains objets de valeur.
En résumé, l’obligation de conseil de l’assureur comprend :
1. L’adéquation des garanties aux besoins de l’assuré.
2. La continuité de cette obligation pendant toute la durée du contrat.
3. L’information sur les évolutions législatives, réglementaires ou jurisprudentielles.
Si l’assuré estime que l’assureur ou son intermédiaire n’a pas rempli son obligation, il peut envisager d’engager sa responsabilité avec l’aide d’un avocat.
2. Les obligations de l’assuré
L’assuré a principalement une obligation de déclaration.
L’article L. 113-2 du Code des assurances impose à l’assuré de répondre exactement aux questions posées par l’assureur lors de la souscription et de déclarer les circonstances nouvelles en cours de contrat. L’assuré doit réponse exactement aux questions posées par l’assureur lors de la conclusion du contrat, notamment dans le formulaire de déclaration du risque, sur les circonstances qui permettent à l’assureur d’apprécier les risques qu’il prend en charge. En cours de contrat, l’assuré doit déclarer les circonstances nouvelles qui aggravent les risques ou en créent de nouveaux, rendant ainsi inexactes ou caduques les réponses précédemment fournies. Cette déclaration doit être faite par lettre recommandée ou envoi recommandé électronique dans un délai de 15 jours à partir du moment où l’assuré en a eu connaissance.
En cas de manquement aux obligations déclaratives, la sanction est de deux types, selon que le manquement est volontaire ou involontaire.
En cas de fausse déclaration intentionnelle, le contrat d’assurance est nul. Cette nullité est prévue par l’article L. 113-8 du Code des assurances, qui stipule que le contrat est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l’assuré, lorsque cette réticence ou fausse déclaration change l’objet du risque ou en diminue l’opinion pour l’assureur, même si le risque omis ou dénaturé n’a pas influencé le sinistre. Les primes payées demeurent acquises à l’assureur, qui a droit au paiement de toutes les primes échues à titre de dommages et intérêts
A titre d’exemple, la nullité du contrat a pu être retenu dans les cas suivants :
- L’assuré a faussement répondu « non » à la question de savoir s’il avait fait l’objet de résiliations de polices d’assurance dans les 36 mois précédents la conclusion du contrat d’assurance (TJ de Bordeaux, 6e chambre civile, 11/07/2024, n°22/06153) ;
- L’assuré a omis de déclarer un état dépressif antérieur (Cour d’appel Toulouse, 3e chambre, 28/05/2019, n° 452/2019, n° 18/02631)
- L’assuré a déclaré qu’un bâtiment agricole désaffecté et inoccupé était une résidence secondaire (Cass. Civ. 2e, 05/07/2018, n°17-21110)
Si la fausse déclaration n’est pas intentionnelle, l’article L. 113-9 du Code des assurances s’applique. Dans ce cas, si la fausse déclaration est constatée avant tout sinistre, l’assureur peut soit maintenir le contrat moyennant une augmentation de prime, soit le résilier. Si la fausse déclaration est constatée après un sinistre, l’indemnité est réduite proportionnellement au taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues si les risques avaient été correctement déclarés.
A titre d’exemple, le caractère non intentionnel a pu être retenu dans le cas d’un assuré qui oublie de mentionner une ancienne opération mineure lors de la souscription d’une assurance santé (Cour d’appel de Versailles, 1ère et 3e chambres civiles réunies, n°21/07535)
En outre, la déchéance de garantie en cas de fausse déclaration relative au sinistre peut être appliquée si une clause expresse et très apparente dans le contrat le prévoit, et si la mauvaise foi de l’assuré est établie. Cette déchéance permet à l’assureur de refuser toute indemnisation pour le sinistre en question.
A titre d’exemple, la déchéance du contrat a été prononcée après que l’assureur a prouvé la mauvaise foi de l’assuré en se basant sur un rapport d’expertise qui a révélé que l’assuré avait fait de fausses déclarations concernant des dommages à des biens mobiliers qui n’étaient pas liés au sinistre ou qui étaient déjà endommagés avant celui-ci (TJ de Meaux, 1ère chambre, 2e section, 24/09/2024, n°22/05298).
Il est donc important de pouvoir être conseillé et accompagné par un cabinet d’avocats, qui permettra de déterminer quel cas s’applique et comment se défendre utilement lorsque l’assureur se prévaut de la nullité du contrat ou d’une déchéance de garantie.
3. Quand engager une action contre son assureur ?
L’article L.114-1 du code des assurances stipule que l’action en responsabilité engagée par l’assuré contre l’assureur pour manquement à l’obligation de renseignement et de conseil se prescrit par deux ans. Ce délai commence à courir à partir du moment où l’assuré a connaissance du manquement et du préjudice en résultant.
Lorsque l’assureur oppose à l’assuré une déchéance du contrat, non seulement la déchéance doit être prévue par une clause du contrat mais aussi la mauvaise foi de l’assuré doit être apportée par l’assureur.
En résumé, pour engager une action contre son assureur, l’assuré doit d’abord identifier un manquement de l’assureur à ses obligations contractuelles, notamment en matière de renseignement et de conseil. S’il estime que l’assureur n’a pas fourni les informations nécessaires ou a fourni des informations erronées, il peut engager une action en responsabilité, qui doit être intentée dans un délai de deux ans.
Le cabinet LBV AVOCATS reste à votre disposition pour vous accompagner dans vos démarches.