La mise en place du règlement intérieur dans l’entreprise
Posté le 26 novembre 2024 dans Droit du travail.
Récemment, dans un arrêt du 23 octobre 2024 (n°022-19726), la Cour de cassation a rappelé que si l’employeur n’accomplit pas toutes les formalités requises pour la mise en place ou la modification d’un règlement intérieur, un syndicat peut demander en référé la suspension du règlement. Seuls les salariés peuvent se prévaloir de son inopposabilité.
C’est l’occasion de rappeler les principes de la mise en place du règlement intérieur dans l’entreprise.
En effet, la mise en place d’un règlement intérieur est une étape cruciale pour toute entreprise, car ce document permet de définir les règles de fonctionnement et de déterminer les droits et obligations des salariés au sein de l’entreprise, en matière de santé, de sécurité et de discipline. Depuis le 1er janvier 2020, il est obligatoire dans toutes les entreprises d’au moins 50 salariés.
A défaut, l’employeur encourt des sanctions pénales et se trouve limité dans l’exercice de son pouvoir disciplinaire.
Dans quel cadre le règlement intérieur est-il obligatoire ?
Avant le 1er janvier 2020, la mise en place d’un règlement intérieur était obligatoire lorsque l’entreprise employait au moins 20 salariés. Désormais et depuis le 1er janvier 2020, la mise en place d’un règlement intérieur est obligatoire dès lors que l’entreprise emploie au moins 50 salariés depuis 12 mois consécutifs.
Les entreprises de moins de 50 salariés peuvent également choisir de mettre en place un règlement intérieur.
Attention, si l’entreprise comporte plusieurs établissements, il faut regarder si l’effectif de 50 salariés est atteint au niveau de l’entreprise et au niveau des établissements :
- Si aucun établissement ne compte 50 salariés, le règlement intérieur doit être mis en place au niveau de l’entreprise ;
- A partir du moment où un établissement compte 50 salariés, le règlement doit être mis en place au niveau de l’établissement pour tenir compte des spécificités. Il est néanmoins admis que lorsque les conditions de travail sont les mêmes au sein des établissements, le règlement intérieur soit identique pour chaque établissement.
Quel est le contenu du règlement intérieur ?
Il est encadré par la loi.
Le règlement intérieur a pour objet de fixer :
– les mesures d’application de la réglementation en matière de santé et de sécurité dans l’entreprise ou l’établissement ;
– les conditions dans lesquelles les salariés peuvent être appelés à participer, à la demande de l’employeur, au rétablissement de conditions de travail protectrices de la santé et de la sécurité des salariés, dès lors qu’elles apparaîtraient compromises ;
– les règles générales et permanentes relatives à la discipline.
Il doit ainsi fixer et rappeler :
- les dispositions relatives aux droits de la défense des salariés en cas de procédure disciplinaire (articles L. 1332-1 à L. 1332-3 du Code du travail) ;
- les dispositions légales relatives au harcèlement moral (L.1152-1 à L.1152-6 du code du travail), au harcèlement sexuel (L.1153-1 à L.1153-6 du même code) et aux agissements sexistes (L.1142-2-1 du même code) ;
- la protection des lanceurs d’alerte ;
- les consignes en matière de santé et de sécurité ;
- les règles relatives à la discipline (nature et échelle des sanctions.
Il est possible de prévoir des clauses restreignant les droits et libertés des salariés à condition qu’elles soient justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché.
A titre d’exemple, le règlement intérieur ne peut pas interdire le mariage entre salariés, le recours à la fouille ou à l’alcootest en toutes circonstances.
Ont en revanche été admises les clauses restreignant la liberté de manifester sa religion proportionnées et justifiées par la nature du poste (clause de neutralité), l’interdiction de toute consommation d’alcool et réprimant tout état alcoolique pour les salariés occupant un poste à risque.
De manière générale, les clauses ayant pour finalité de restreindre les droits des salariés doivent faire l’objet d’une rédaction précise et soignée afin d’être valables.
L’appui et le conseil d’un cabinet d’avocat est fortement recommandé.
Quelle est la procédure de mise en place ?
Le règlement intérieur est un document qui est établi unilatéralement par l’employeur.
Il est impérativement rédigé en français mais peut être accompagné de traductions dans d’autres langues.
Lorsque l’entreprise est pourvue de représentants du personnel, le règlement intérieur doit être soumis à l’avis du Comité Social et économique.
Il s’agit d’une simple consultation mais qui est obligatoire. Si l’employeur omet de soumettre le règlement intérieur à l’avis du Comité, le règlement intérieur est inopposable aux salariés.
En cas d’absence de représentants du personnel, l’employeur doit être en mesure d’en justifier par la production d’un procès-verbal de carence aux dernières élections professionnelles.
Le règlement intérieur est adressé :
- A l’inspection du travail, en deux exemplaires, accompagné de l’avis du Comité social et économique ;
- Au greffe du Conseil de prud’hommes du siège de l’entreprise ou de l’établissement.
Il est également affiché dans les locaux de l’entreprise et/ou publié sur l’intranet de l’entreprise et communiqué à tous les salariés.
L’employeur doit être en mesure de prouver que le règlement intérieur a bien été porté à la connaissance des salariés : il est donc recommandé d’adresser un email aux salariés déjà présents dans l’entreprise et de remettre aux nouveaux salariés le règlement intérieur au moment de leur embauche, en annexe au contrat de travail.
Le règlement intérieur entre en vigueur dans l’entreprise un mois après la dernière formalité accomplie, que ce soit le dépôt à l’inspection du travail ou au greffe du Conseil de prud’hommes, ou la publicité auprès des salariés.
Comment procéder pour modifier le règlement intérieur ?
Un ajout, une modification ou rectification du règlement intérieur impose de procéder aux mêmes formalités que pour la mise en place.
A défaut, la nouvelle mouture sera inopposable aux salariés.
Par exception, si la modification a été imposée par l’inspecteur du travail, la consultation du comité social et économique n’est pas nécessaire. Seules les formalités de dépôt et de publicité sont à effectuer.
Quelles sont les conséquences de l’absence de règlement intérieur ou d’irrégularité dans sa mise en place ?
En l’absence de règlement intérieur :
- Le pouvoir disciplinaire de l’employeur est restreint puisqu’il ne peut pas prononcer l’autre sanction qu’un licenciement ;
- La société est passible d’une contravention de 4e classe.
En cas de non-respect de la procédure de mise en place :
- Le règlement intérieur n’est pas opposable aux salariés et toute sanction autre qu’un licenciement est nulle ;
- La société est passible d’une contravention de 4e classe ;
- Une organisation syndicale peut solliciter en référé la suspension du règlement intérieur (Cass. Soc. 23/10/2024, n°22-19726).
Le cabinet LBV AVOCATS reste à votre disposition pour vous accompagner dans vos démarches.