L’originalité est l’une des conditions de protection de la forme dans les conditions de protection d’une œuvre.

En effet, pour qu’une œuvre soit protégée par le droit d’auteur, il doit s’agir d’une forme originale. Le droit français entend la notion d’originalité comme étant l’expression de l’empreinte de la personnalité de l’auteur. Dans son arrêt INFOPAQ, la Cour de justice de l’Union Européenne – dont les décisions sont applicables en droit français – a retenu le critère de la « création intellectuelle propre à son auteur », marquant ainsi une objectivisation de l’approche par rapport au droit français.

Cette notion est floue, donc malléable, ce qui lui permet de s’adapter à toute création nouvelle et à toute technologie nouvelle. Les juges n’ont ainsi eu aucune difficulté à appliquer la notion d’originalité aux premiers films, aux premiers CD, aux premiers logiciels, aux premiers sites internet…

Cela implique que la notion d’originalité reste une notion ouverte en permanente évolution. Aujourd’hui, nous pouvons retenir qu’est originale une œuvre dont la forme n’est pas imposée par la technique. A ce titre, une forme originale de voiture – qui ne serait pas imposée par des raisons techniques liées à l’aérodynamisme du véhicule – serait protégée par le droit d’auteur. Il en irait de même d’un tweet (indépendamment de sa longueur) et de toute création (photographie, vidéo etc…) dont la forme ne serait pas imposée par des considérations techniques. Le droit français s’avère globalement plus protecteur que le droit d’auteur américain (dit copyright) qui demande un niveau d’originalité plus marqué (à titre d’exemple, un tweet n’est pas protégé outre-Atlantique car les juges considèrent que le texte est trop court pour faire preuve d’originalité).

Dans la pratique, la notion d’originalité se distingue parfois difficilement de la notion de nouveauté. En effet, si deux auteurs ont élaboré des créations similaires, il n’est pas rare que les juges retiennent que l’auteur à l’origine de la seconde œuvre soit contrefacteur, car il se serait inspiré de la première.

Il est en tout état de cause utile de constituer la preuve de la création, notamment par l’envoi d’une lettre SOLEAU, d’un recommandé avec accusé de réception ou par dépôt chez un notaire Cela permet d’écarter toute discrimination entre les œuvres et assure ainsi la protection des œuvres indépendamment de leur nature ou de leur mérite.

Cela permet de protéger des œuvres telles que des livres, des tableaux, des cartes, des bases de données (qui bénéficient d’un cumul de protection par le droit d’auteur et un droit spécial des bases de données, applicable dès lors que le développement de la base est le fruit d’un effort substantiel), des films ou encore des logiciels. Cependant, en matière de logiciel, les juges ont retenu – dans l’arrêt dit PACHOT – que le critère de protection résidait dans « la marque de l’apport intellectuel de l’auteur ». Il y a donc une objectivisation de la notion d’originalité en matière de logiciel. La directive dite « Programme » de 1991 a repris ce critère en matière de logiciel.

D’autres critères sont en revanche indifférents. Il en va ainsi du genre de l’œuvre (le droit d’auteur s’applique indifféremment à une œuvre des beaux-arts, à une œuvre littéraire, à une œuvre audiovisuelle, à une œuvre d’application industrielle, à un logiciel etc…). La forme d’expression n’aura aucune incidence.

Le droit d’auteur est également indifférent au mérite. En effet, le juge n’a pas le rôle de critique d’art ou de critique littéraire. Cela permet d’appliquer le droit d’auteur à toute œuvre sans filtre ni censure, assurant ainsi la protection de mouvements artistiques nouveaux ou minoritaires. L’indifférence du mérite ne permet cependant pas une protection adaptée de l’art contemporain qui repose sur des fondements nouveaux. Le droit d’auteur rencontre ainsi des difficultés à appréhender l’originalité d’une œuvre basée sur la dépersonnalisation (pour citer Bernard Frize). Les juges cherchent souvent l’originalité dans le sens de l’œuvre, plutôt que dans la forme de l’œuvre, dans une torsion des concepts traditionnels soulevant la question de la légitimité du recours à la notion d’originalité.

En cas de litige, l’auteur devra apporter la preuve que son œuvre est originale. Cela peut poser des difficultés pratiques. Un rapport du Conseil supérieur de la propriété intellectuelle avait préconisé que l’originalité soit présumée (ce qui aurait permis aux auteurs de ne pas supporter la charge de la preuve de l’originalité de leur création), mais cette recommandation n’a pas vu le jour. Seuls les titres sont présumés originaux – et sont par conséquent présumés protégés – sauf preuve contraire du défendeur. Une partie de la doctrine juridique encourage l’établissement d’une présomption d’originalité en matière photographique.

Vous trouverez à cette adresse une vidéo en partenariat avec l’éditeur juridique LEXBASE expliquant la notion : #1La notion d’originalité présentée par Me Mickaël LE BORLOCH – YouTube