Je suis entrepreneur et l’administration vient de mettre fin de façon anticipée au marché public que j’avais conclu avec elle, alors que ce dernier est toujours en cours, que faire ?

Qu’est-ce qu’un marché public ?

L’article L1111-1 du code de la commande publique définit un marché public comme « un contrat conclu par un ou plusieurs acheteurs soumis au présent code avec un ou plusieurs opérateurs économiques, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services, en contrepartie d’un prix ou de tout équivalent ».

Il s’agit pour l’État, ses établissements publics administratifs, les collectivités territoriales et les établissements publics locaux de recourir à une personne publique ou privée, pour répondre à ses besoins, en échange d’une rémunération.

Il existe plusieurs types de marchés publics (articles L.1111-2 à L.1111-5 du code de la commande publique) :

  • les marchés de travaux pour la construction de bâtiments publics ;
  • les marchés de fournitures pour l’achat, la prise en crédit-bail, la location ou la location-vente de produits nécessaires au fonctionnement de l’administration (stylo, ordinateur …) ;
  • les marchés de services pour la réalisation de prestations de service (nettoyage de locaux…).

Quels sont les principaux motifs de résiliation d’un contrat de marché public ?

  1. La résiliation pour faute :

Les cahiers des clauses administratives générales peuvent détailler les fautes du titulaire du marché public pouvant entrainer une résiliation, et la procédure à suivre dans pareil cas.

En l’absence de clause prévue en ce sens, une faute présentant certaines caractéristiques est nécessaire pour justifier la résiliation aux torts du titulaire du marché public.

L’article L. 2195-3 du code de la commande publique prévoit que l’administration peut résilier le marché public « en cas de faute d’une gravité suffisante » du titulaire du marché.

Si l’administration vous reproche une faute dans l’exécution du marché public, elle peut résilier le marché public et vous ne serez pas indemnisé.

Si vous avez commis une telle faute dans l’exécution du marché, l’administration peut également vous faire supporter le coût de la passation d’un nouveau marché conformément aux dispositions du code de la commande publique, et bien évidemment, sans indemnisation.

2. La résiliation pour motif d’intérêt général :

En principe, lorsque l’administration résilie le marché public pour motif d’intérêt général, une indemnisation du titulaire du marché public est possible (article L.2195-3 du code de la commande publique).

Dans ce cas, la jurisprudence considère que le titulaire du marché public a droit à la réparation intégrale du préjudice résultant de la fin anticipée du contrat. Cette indemnisation prend en compte les dépenses engagées ainsi que le manque à gagner du titulaire.

Le cahier des clauses administratives générales (CCAG) peut également prévoir, en cas de résiliation pour motif d’intérêt général, le versement d’une indemnité équivalent à un pourcentage du montant du marché.

Toutefois, cette indemnisation n’est possible que sous réserve des clauses du marché public.

En effet, le marché public ne doit pas comprendre de clause excluant le principe d’une indemnisation (5° de l’article L. 6 du code de la commande publique).

Le titulaire du marché public peut donc avoir la désagréable surprise, lorsque l’administration l’informe qu’elle souhaite résilier le marché public pour motif d’intérêt général, de découvrir  une clause excluant le principe de l’indemnisation en cas de résiliation du marché public pour un motif d’intérêt général, à laquelle il n’avait pas prêté attention lors de la signature…

3. La résiliation pour force majeure

L’article L.2195-1 du code de la commande publique pose clairement le principe : l’administration peut résilier le marché pour un motif de « force majeure ».

L’évènement de force majeure doit répondre aux trois conditions cumulatives suivantes :

  • L’événement doit survenir de façon imprévisible.

La difficulté doit être telle qu’elle ne pouvait avoir été prévue raisonnablement lors de la conclusion du contrat.

  • L’événement doit entrainer des effets irrésistibles.

En d’autres termes, le titulaire du marché ne peut provoquer cette impossibilité totale et insurmontable d’exécuter les obligations lui incombant dans le cadre du marché public, elle doit s’imposer à lui.

  • L’événement doit être d’une gravité telle qu’il entraine une impossibilité d’exécuter le contrat.

Si l’événement est imprévisible, irrésistible et rend impossible l’exécution du contrat, une indemnisation du titulaire du marché public est possible.

Les documents contractuels du marché public peuvent prévoir les modalités de l’indemnisation du titulaire du marché dans pareil cas.

Si les documents contractuels du marché public ne prévoient pas les modalités de l’indemnisation, l’indemnisation du titulaire du marché public est possible pour les pertes matérielles qu’il subit du fait de l’événement de force majeure.

Cette indemnisation comporte plusieurs limites. Elle ne peut pas couvrir le manque à gagner qui est imputable à la résiliation du contrat, ni les cotisations déjà réglées à l’URSSAF, ni les pertes engendrées par les immobilisations de matériels ou de personnels qui ne sont pas directement imputables à l’événement de force majeure. 

Comment puis-je contester la décision de résiliation du marché public ?

Le plus souvent, les cahiers des clauses administratives générales (CCAG) prévoient qu’une mise en demeure doit être adressée au titulaire du marché public. Cette mise en demeure peut être obligatoire selon le type de motif de résiliation, et doit détailler les éventuels manquements aux obligations du marché public par le titulaire du marché si une résiliation pour faute est envisagée.

La résiliation du marché public par l’administration se concrétisera par une décision qui devra préciser le type de résiliation, et les motifs évoqués pour justifier cette résiliation.

Si vous souhaitez contester la résiliation du marché public dont vous êtes titulaire, vous pouvez saisir le Tribunal administratif dans le délai de 2 mois suivant la notification de la décision de résiliation du marché public.

Le juge administratif dispose de prérogatives importantes, utilisées cumulativement ou alternativement en fonction des circonstances de l’affaire :

  • Annuler la résiliation du marché public ;
  • Ordonner la reprise des relations contractuelles ;
  • Accorder une indemnité, si aucune faute n’a été commise par le titulaire du marché public ;

Cette procédure de contestation de la décision de résiliation peut être accompagnée d’une procédure d’urgence afin d’obtenir la suspension de la décision de résiliation devant le juge des référés, à condition de pouvoir justifier d’une condition d’urgence et d’un doute sérieux quant à la légalité de la décision (article L.521-1 du code de justice administrative).

Lien utiles :

https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000037701019/LEGISCTA000037703254/#LEGISCTA00003770325